Le Monde Libertaire en accès gratuit pendant le confinement !

Aujourd’hui la priorité est à la santé de toutes et tous. Demain il nous faudra nous délester de ces gouvernements d’amateurs qui mettent à mal nos sociétés.

En attendant, pour aider à faire face à cette situation inédite de confinement, d’isolement ou de solitude presque partout dans le monde, l’équipe du Monde Libertaire met en accès libre l’ensemble de ses publications.


A télécharger et diffuser le plus largement possible pour se retrouver, demain, plus nombreux encore dans les luttes.


L’équipe de l’administration du ML

Le Monde libertaire hebdo n° 1774

Le patronat a toujours le mot pour rire, notamment quand il se gargarise avec le dialogue social. Ainsi, chez le groupe Air Liquide, où on pouvait constater en 2008 des situations anormales quant à l’évolution salariale et professionnelle d’élus et mandatés CGT. Malgré la preuve des inégalités flagrantes dont étaient victimes onze militants syndicalistes, la direction ne voulait accepter de régler qu’une partie du préjudice, et pour deux d’entre eux seulement. Plaintes, tribunal, prud’hommes, cour d’appel, parcours judiciaire tortueux, mais, au final, sept militants voient leurs discriminations reconnues. Air Liquide doit donc cracher au bassinet, et pas qu’un peu : dommages et intérêts (de 7 700 à 61 000 euros suivant les cas), salaires réévalués avec effet rétroactif à 2009 (141 à 523 euros), condamnation pour violation de l’accord syndical (sept fois 3 500 euros), plus 21 000 euros à verser à la Fédération nationale des industries chimiques (CGT) pour discrimination syndicale, et pour finir 20 000 euros pour deux militants pour préjudice subi pour leur santé (exposition à l’amiante). Au total, une addition salée s’élevant à 700 000 euros. Moralité : la lutte paie, car de l’argent il y en a... dans les poches du patronat. 

Le Monde libertaire hebdo n° 1773

À qui appartient la pluie ? Aux États-Unis, il semble que ce soit au gouvernement. Ainsi, en 2002, l’État de l’Oregon avait déjà condamné un particulier à trente jours de prison et 1 500 dollars d’amende, pour avoir recueilli de l’eau de pluie dans sa propriété. Les autorités avaient jugé qu’il s’agissait de « réserves illégales » puisque constituées sans autorisation administrative. Fini, donc, les citernes des premiers pionniers destinées à se remplir au gré des pluies. À qui appartient le soleil ? En Espagne, le gouvernement propose de revoir à la hausse le montant des taxes concernant l’électricité produite à partir des panneaux solaires installés sur leur résidence (à leurs frais) par les particuliers. Fini d’autoproduire son énergie et de ne plus avoir à payer celle fournie par l’État. À qui appartient l’air ? Pour le moment à personne, mais un conseil : faites des réserves, on ne sait jamais... Pendant ce temps, de l’autre côté de l’Atlantique, après un demi-siècle de guerre froide, après la Baie des Cochons, après la crise des missiles, après les discours/invectives de part et d’autre, on oublie tout et on se serre la main. C’est ce qu’ont fait Raúl Castro et Barack Obama. On en frémit d’aise : les Cubains arborant les tee-shirts publicitaires avec le logo de Coca-Cola, et les Yankees ceux à l’effigie de Che Guevarra. Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Le capitalisme peut dormir tranquille.

Concert de soutien au Monde libertaire (Marseille) !

Le Monde libertaire hebdo n° 1772

Guerre au terrorisme, c’est la nouvelle priorité. On nous demande de tout lui sacrifier, à commencer par ce que nous avons de plus précieux : il faudrait renoncer à nos libertés au profit de notre sécurité. Le projet de loi sur le renseignement a été concocté par le gouvernement, bien avant les attentats contre Charlie et est loin de ne concerner que les actes de terrorisme. Il s’agit de légaliser des techniques de surveillance non ciblée, c’est-à-dire de masse, ce qui sort du cadre légal actuel. En principe ces nouvelles méthodes intrusives doivent avoir l’aval de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR). Dans le cas contraire, la décision finale appartiendra au Premier ministre. Il peut d’ailleurs également se passer de l’avis du CNTCR en cas « d’urgence absolue ». Qui déterminera s’il s’agit d’urgence « absolue » ? Ça reste flou, mais une chose est sûre : militants politiques et syndicaux, journalistes, mouvements sociaux ont du mouron à se faire dans un avenir très proche. 1984 arrive en 2015.

Le Monde libertaire hebdo n° 1771

Quand vous lirez ces quelques lignes, vous serez sûrement en train de marcher sur le bitume parisien, entouré de milliers d’autres travailleurs, précaires et chômeurs manifestant contre la loi Macron et, de manière générale, contre la politique de François Hollande. Le 9 avril, c’est la date choisie par la CGT, FO et Solidaires pour faire entendre le ras-le-bol du monde du travail contre des ministres et un président qui n’en finissent plus de répondre favorablement à la moindre exigence du Medef. En cela, la gauche parlementaire remplit parfaitement son rôle historique : celui d’attaquer les droits des travailleurs en période de crise. La droite, elle, si elle en rêve, n’est pas toujours en mesure d’y parvenir, ne réussissant que plus difficilement à mettre de son côté certaines grandes centrales syndicales (CFDT). Rien de surprenant, donc, à ce que le président Hollande soit bien loin du candidat qu’il était en 2012 et des promesses qu’il déclamait dans les médias dans l’espoir d’être élu. La gauche parlementaire n’a jamais vraiment servi les intérêts des travailleurs et elle se révèle même à nouveau aujourd’hui en être le fossoyeur. La loi Macron, comme les précédentes mesures adoptées (CICE, ANI, pacte de responsabilité), fait du pied au patronat en lui offrant quantité de cadeaux fiscaux et en instaurant la flexi-sécurité comme mode de gestion du marché du travail : licencier plus facilement pour embaucher plus facilement ; précariser les contrats de travail pour embaucher plus facilement. La précarité et les licenciements en rafale, ça, on connaît. L’embauche, en revanche, on attend toujours. En fait, on n’attend plus rien. Depuis longtemps. On a compris, enfin, qu’il n’y avait rien à attendre de l’État. Notre émancipation n’est pas dans l’hémicycle. Elle est dans la rue et dans la grève. 

Le Monde libertaire hors-série n° 60

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Le Monde libertaire hebdo n° 1769

Les violences faites aux femmes concernent tous les pays, mais, dans certains, leur nombre est en spectaculaire augmentation. Ainsi, en Turquie, selon les experts, les meurtres de femmes ont augmenté de 31 % entre 2013 et 2014. Ça n’a pas empêché un animateur TV de déclarer le plus sérieusement du monde : « Les femmes qui portent une mini-jupe et se promènent à moitié nues n’ont aucun droit de se plaindre si elles sont harcelées. » Et, cerise sur le gâteau, en cas de viol ou meurtre de l’une d’elles, l’agresseur peut bénéficier d’une peine réduite en déclarant que sa victime « portait un jean, qu’elle rentrait chez elle tard le soir ou qu’elle avait des pilules contraceptives dans son sac à main ». Faut les comprendre, ces mâles, personne ne leur a dit que la femme est l’avenir de l’homme. Et pendant ce temps, en Arabie saoudite, cet allié objectif de l’Occident, le blogueur Raif Badawi est toujours emprisonné pour avoir créé un forum de débat public considéré comme une insulte à l’islam. Condamné à dix ans de prison et 1 000 coups de fouets, il n’en n’a reçu pour l’instant « que » cinquante au cours de la première séance. Le reste de la sentence n’est pas annulé mais suspendu (le temps qu’il se requinque un peu ?) Mais au cas où le fouet ne suffirait pas, la « justice » de son pays veut maintenant le juger pour apostasie. Le renoncement à sa religion est passible de la peine de mort, et ce n’est pas son avocat qui pourra le défendre : il vient lui-même d’être condamné à quinze ans de prison. Comme on dit en religieux courant : Dieu est grand et sa miséricorde infinie.  

Le Monde libertaire hebdo n° 1768

Dans notre belle république, nous sommes pratiquement toujours en période électorale. Cette fois-ci, il s’agit des élections départementales, qui auront lieu les 22 et 29 mars. Le FN est au taquet. Tellement qu’il voudrait être présent partout, ce qui n’est pas encore le cas. Qu’à cela ne tienne, avant la pêche aux voix il y a la pêche aux candidats, et tous les moyens sont bons. L’Humanité nous l’apprend, au terme d’un forcing éhonté, des anciennes adhérentes du FN ayant rendu leur carte se sont quand même retrouvées sur des listes FN (et même tête de liste pour l’une). On avait déjà eu l’occasion de voir voter des morts, on a maintenant des candidats à l’insu de leur plein gré. Pendant ce temps, on apprend que Stuart Gulliver, le patron anglais de HSBC, détenait lui-aussi un compte en Suisse. Shocking à la City où les mauvaises performances de la banque (l’action HSBC à la Bourse de Londres a chuté de 5 %) font tâche à côté du compte personnel en Suisse de Mister Gulliver (6,7 millions d’euros). Compte alimenté via une société lui appartenant et basée au Panama. Le petit cachotier a tenté d’expliquer que ce dispositif visait à cacher le montant de ses primes à ses collègues, ajoutant que ces pratiques n’affectent en « aucune manière » sa capacité à diriger le groupe. Si on comprend bien, y a plus qu’à lui augmenter ses stock-options et revaloriser le montant de son parachute doré.

Le Monde libertaire hebdo n° 1767

Après les attentats perpétrés par les frères Kouachi d’un côté, et Coulibaly de l’autre, les médias ont mis le paquet pour nous montrer combien nous aimons notre police. Jusqu’à embrasser des CRS pendant la manifestation du 11 janvier 2015. Touchant. Sûr que Rémi Fraisse aurait voulu lui aussi pouvoir déclarer son amour aux forces de l’ordre. Malheureusement, il est indisponible depuis quelque temps. Par la faute d’une grenade. Au fait, elle passe quand en jugement la grenade ? Pendant ce temps, notre président offre ses bons services pour tenter de mettre fin au conflit en Ukraine. C’est vrai, la guerre, c’est pas bien. Afrique, Moyen-Orient, Afghanistan, plan Vigipirate, on voit des uniformes français partout. Jusqu’à la nausée. Mais nous, c’est pour la bonne cause, pour porter la civilisation sous toutes les latitudes. Et puis, pour nos dirigeants, rien de mieux que d’appeler à l’union nationale pour faire grimper les sondages. Esprit du 11 janvier es-tu encore là ? Nos politiciens ont besoin de toi.

Le Monde libertaire hebdo n° 1766

 

Dans sa dernière conférence de presse, François Hollande a pratiquement éludé la question économique. L’emploi ? C’est pas le moment, l’heure est à « l’unité nationale ». Nous sommes tous Charlie. Avant d’être tous chômeurs ? L’avenir nous le dira. Et l’avenir, pour François Hollande, c’est surtout 2017. Si la fameuse courbe du chômage ne se décide pas à s’inverser, notre président l’a dit : il ne voit pas comment il pourrait de nouveau être candidat à la fonction suprême. Ben, nous non plus. L’abus d’unité nationale est dangereux pour la santé de François Hollande. Esprit du 11 janvier, si tu es là, frappe un coup : dans deux ans on risque de ne pas entendre grand-chose… En attendant, on a pu assister à une belle opération de communication à Marseille. Manuel Valls s’y était rendu, pensant sans doute que sa visite l’aiderait à gagner quelques points de popularité. Raté. Sa venue a été précédée de quelques tirs de kalachnikov dans les quartiers nord de la cité phocéenne, ce qui n’a évidemment pas été de son goût, lui qui venait pour réaffirmer l’autorité de l’État. Son très bref bain de foule ne lui aura servi qu’à entendre quelques cris du genre : « Du pain, pas des discours ! » Et pour finir, le bilan du mois : sept points de popularité perdus. Tout ça pour ça. Mais où est donc passé l’esprit du 11 janvier ?

Le Monde libertaire hebdo n° 1765

À la CGT, la crise est en passe d’être terminée. L’ancien secrétaire général Thierry Lepaon a donc fini par prendre la porte (pas trop tôt), remplacé par le n° 1 de la Fédération de la métallurgie, Philippe Martinez. Le bougre aux belles bacchantes est un vieux bourlingueur du syndicalisme, désireux de remettre la CGT sur les rails de la lutte des classes, rompant avec la stratégie de négociation et de cogestion empruntée depuis quelques années par les directions précédentes. Bonne nouvelle ? Sur le plan de la combativité, oui, si toutefois ces appels à la radicalisation ne sont pas de simples postures destinées à séduire une base quelque peu remuante ces derniers mois. Mais pas tant que ça si on considère les liens du nouveau secrétaire général avec le Parti communiste, liens qui appellent à un nouveau rapprochement entre la centrale syndicale et le landernau qui siège au Colonel-Fabien. À croire que dans la CGT on ne peut décidément pas se faire plus radical sans renouer avec la vieille tradition nauséabonde des liens structurels entre les communistes autoritaires (qui restent des ennemis objectifs de l’émancipation prolétarienne) et l’organisation de classe. À moins que les anarchistes qui luttent dans cette CGT en crise se coordonnent enfin pour proposer une alternative, celle d’une lutte des classes s’exprimant dans le cadre libertaire de l’autonomie ouvrière. 

Le Monde libertaire hebdo n° 1764

C’est entendu ; en Grèce ce n’est pas la révolution, mais c’est quand même un coup de pied au cul des formations politiques traditionnelles. D’où l’inquiétude des politiciens à travers toute l’Europe, à commencer par l’Espagne où le jeune parti Podemos (Nous pouvons) espère bien emboîter les pas de Syrisa. C’est que 2015 est une année d’échéances électorales outre-Pyrénées (municipales, législatives…) Parti populaire (PP) et Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) pratiquent la méthode Coué et veulent se convaincre, et convaincre la population que l’Espagne n’est pas la Grèce. Difficile à croire au vu de ce que le peuple ibère subit depuis plus de quatre ans. Même s’il ne faut pas s’attendre à grand-chose de Podemos (issu d’une partie des Indignés), se disant ni de droite, ni de gauche, la simple peur qu’il inspire à la vieille classe politique fait plaisir à voir. Mais en Espagne, en Grèce ou ailleurs, prétendre changer les choses par un simple toilettage du capitalisme risque de s’avérer rapidement insuffisant et décevant. Le capitalisme ? Une vieille idée à jeter aux poubelles de l’histoire.

Le Monde libertaire hebdo n° 1763

De l’argent, y en avait… dans les poches de l’État. Nous voilà rassurés. Nous étions sur le point de nous laisser convaincre que les caisses de l’État étaient vides, puisqu’on ne nous annonçait que coupes budgétaires et suppressions de postes. Et puis, miracle. Il a suffit d’une hécatombe déclenchée par la reproduction d’un visage de prophète et, de nouveau, des postes sont à pourvoir, des budgets accordés à coups de millions généreux. Pour la Santé, l’Éducation ? Ne nous faites pas rire, nous avons les lèvres gercées. Non, nous vous parlons d’urgence nationale, là. Valls, de plus en plus raide dans ses postures, a tout balancé d’un coup : tout pour les forces de l’ordre et l’armée ; renforcement général des moyens financiers techniques et humains de l’antiterrorisme, tant sur le plan police que sur le plan justice. Création de 2 680 emplois sur trois ans. Et questions pépètes : 736 millions d’euros injectés sur trois ans. La future loi sur le renseignement sera présentée au Parlement début mars, avec au menu l’extension des écoutes téléphoniques. Ça promet. Le tout au milieu d’un climat de délation qui va s’amplifier. On vit décidément une époque formidable.

Le Monde libertaire hors-série n° 59 est dans les kiosques !

 

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Le Monde libertaire hebdo n° 1762

Précaires, réjouissez-vous ! Avec la loi Macron, en passe d’être adoptée à l’Assemblée nationale, à vous le travail dominical, de nuit et pendant les jours fériés, le tout avec plein d’autres douceurs. Et, pendant ce temps, on nous défend à cor et à cri la sacro-sainte liberté d’expression. Mais qui s’est levé, dimanche 11 janvier 2015, pour la défendre ? Le Premier ministre turc qui laisse l’État islamique massacrer les révolutionnaires kurdes ? Le Premier ministre espagnol qui enferme les militants anarchistes ? En tout cas, sûrement pas les travailleurs du dimanche. Ni ceux qui ne sont pas dupes de cette union nationale des imbéciles qui, sous couvert d’ennemi intérieur de la nation (Robespierre nous a déjà fait le coup), cherche à diviser le prolétariat et à l’éloigner de la revendication de ses intérêts de classe. De fait, la mascarade gouvernementale, massivement portée par des médias hystériques, a permis de passer sous silence les discussions autour de cette loi Macron… offrant son vote sur un plateau d’argent au jeune ministre de l’économie – jeune mais déjà milliardaire –, tout juste de retour de Las Vegas, où il défendait il y a quelques jours la France qui innove et investit à l’étranger… Désormais, il est temps que l’émotion retombe et que la guerre sociale batte à nouveau son plein.

Le Monde libertaire hebdo n° 1761

Barbarie, massacre, carnage, scène de guerre… on ne va pas reprendre tous les qualificatifs qui fleurissent dans l’ensemble des médias sur la tuerie perpétrée à Charlie Hebdo, mais le mot horreur les résume à peu près tous. Horreur de voir que, de nos jours, on utilise des balles contre un crayon et du papier. Écœurement devant les réactions nauséabondes qui n’hésitent pas à faire des amalgames douteux. Et que dire devant le bal des faux-culs de tous ces chefs d’État voulant se faire passer pour des défenseurs de la liberté d’expression ? Déjà la belle défense de cette dernière s’accompagne de réserves à peine voilées : on peut rire de tout, mais pas de la religion ; d’aucune religion ; et on sent bien depuis un bout de temps que, dans une partie de la population, certains regrettent qu’il n’y ait pas en France une loi interdisant le blasphème, comme c’est le cas dans d’autres pays, comme ça l’était dans le nôtre avant la Révolution de 1789. Chaque religion ayant ses fous de Dieu, la liberté d’expression est encore et toujours attaquée. Et de la liberté d’expression à la liberté tout court, la distance est courte. Gare aux mesures d’exception qui peuvent rapidement déboucher sur des lois scélérates. Gare aux appels à la haine contre telle ou telle communauté. Religion, État, l’absolutisme couve toujours, tapi dans l’ombre. Contre la liberté de la presse, d’opinion, d’expression, c’est la guerre ? Ça l’a toujours été. Alors ne baissons pas la garde, plus que jamais, ni dieu ni maître.

Le Monde libertaire hebdo n° 1760

Ça y est, c’est fait. Changement d’année et nouveau discours du président de la République. Nouveau ? Pas sur la forme : air martial (c’est la loi du genre) pour déclarer qu’il « [a] tenu bon et suivi fermement le cap », rappelant l’instauration de la réforme territoriale et le pacte de responsabilité (on ne va pas lui dire merci), n’hésitant pas à déclarer que, « face au chômage, c’est en faisant preuve d’initiative que nous réussirons », oubliant de revenir sur l’échec de sa politique qui devait inverser la courbe de ce chômage avant la fin 2014. Nous avons pu constater l’inverse, mois après mois. C’est sans doute en cela qu’il s’est agi pour François Hollande d’une « année rude et jalonnée d’épreuves de toutes sortes ». Pas sur le fond non plus : cette gauche, ce « socialisme », ne compte pas remettre en cause le capitalisme. À preuve le projet de loi Macron, censé « libérer les initiatives, casser les rentes, libérer les énergies, l’activité, développer l’emploi, simplifier la vie des entreprises tout en protégeant les salariés ». Protéger les salariés, on a comme un gros doute, et c’est un euphémisme. « La France est capable de se transformer. Je sais que vous y êtes prêts. » Se transformer ? Nous aussi nous le croyons. Prêts ? Nous sommes un certain nombre à l’être. Pas dans le sens voulu par les maîtres de ce monde, mais par ceux d’en bas, qui veulent prendre enfin leur destinée en mains. Alors pour 2015, nos vœux ne seront pas ceux du chef de l’État. Non, pour notre part nous vous souhaitons (et nous nous souhaitons) de nombreuses rébellions, révoltes et révolutions. 

Le Monde libertaire hebdo n° 1759 : spécial 60 ans de ML !

Il y a un peu plus de soixante ans, au mois d’octobre 1954, le mensuel Le Monde libertaire paraissait pour la première fois, faisant suite au Libertaire, créé en 1895. L’organe de la Fédération anarchiste, laquelle sortait d’une grave crise interne, se présentait alors comme le fruit commun de « libertaires unis de toutes les écoles ». Six décennies plus tard, Le Monde libertaire, devenu hebdomadaire depuis 1977, est toujours là. On peut s’en réjouir, comme regretter que ses dénonciations du système capitaliste et de l’État soient toujours aussi nécessaires. Car, de fait, le capitalisme ne s’est pas écroulé, se renforçant au fil de ses crises, dépassant violemment certaines de ses contradictions, en inscrivant toujours plus profondément dans nos chairs le fer rouge de l’exploitation économique et de l’oppression politique. Mais gardons-nous du pessimisme, que nous laisserons aux cyniques et aux résignés, et redoublons plutôt d’effort pour construire la révolution sociale. En cela, Le Monde libertaire, si modeste soit-il, continuera tant qu’il le faudra de se faire l’écho des luttes émancipatrices et d’accueillir dans ses colonnes les débats politiques indispensables à l’élaboration permanente de la pensée anarchiste, pensée vivante s’il en est. Soixante ans, après tout, ce n’est pas si vieux, et notre journal a encore toutes ses dents pour déchirer en lambeaux les liens qui nous enchaînent à cette société invivable où le bonheur de quelques-uns implique le sacrifice de milliards d’autres.

Le Monde libertaire hebdo n° 1758 : spécial 150 ans de l’AIT !

Il y a quelques années, l’écrivain galicien Manuel Rivas écrivait : « Aujourd’hui, ils ont tous une Internationale, sauf les travailleurs. » La Première Internationale fut fondée, il y a 150 ans, le 28 septembre 1864, à Londres. Elle était composée d’organisations et d’individus représentatifs d’un large éventail de philosophies. Les anarchistes, en particulier les mutualistes, s’opposaient aux communistes et à l’étatisme. Après l’entrée des anarchistes collectivistes, l’Internationale se divisa de façon permanente en deux camps distincts : celui de ceux qui soutenaient l’État et ceux qui s’y opposaient. En 1872, les marxistes expulsèrent les anarchistes de l’AIT. L’Internationale ne survécut pas à ses divisions, mais les anarchistes essayèrent de la ressusciter. À la fin de 1922, l’AIT fut relancée et fit, dès sa création, une déclaration claire contre les avant-gardes politiques. Rejetant ainsi le rôle du parti dans la libération de la classe ouvrière, elle refusa les idées du PC, qui cherchait à unir toutes les organisations des travailleurs révolutionnaires sous son aile, dans la poursuite de ses objectifs. Le premier principe du syndicalisme révolutionnaire qui apparaît dans les statuts de l’AIT est : « Le syndicalisme révolutionnaire, basé sur la lutte des classes, vise à unir tous les travailleurs dans les organisations économiques combatives, qui luttent pour se libérer du double joug du capital et l’État. » Les objectifs de ceux qui voulaient réaliser un changement social à travers l’État ou le parti révolutionnaire n’étaient pas les objectifs des anarchistes qui entrèrent dans l’Internationale, ces derniers réalisèrent finalement le fossé infranchissable entre les deux idées. Les travailleurs ont à réinventer aujourd’hui l’Internationale, une arme absolue contre la domination capitaliste qui permet d’élargir nos horizons et de retrouver le sens des possibles. 

Le Monde libertaire hebdo n° 1757

À chacun son pèlerinage. Mitterrand avait sa roche de Solutré, Hollande, lui, c’est le site Arcelor-Mittal de Florange. L’année dernière, l’accueil avait été plutôt frais au milieu des sifflets et des huées. La semaine dernière, ça s’est mieux passé ; il faut dire qu’en plus d’être entré par la petite porte les autorités lui avaient bien préparé la visite : élus locaux triés sur le volet, ainsi que présence d’ouvriers « reclassés » soigneusement sélectionnés. François Hollande a donc pu tranquillement s’autocongratuler, rappelant que Mittal avait procédé à trente embauches en CDI (avec les sept millions d’euros de crédit d’impôt recherche qu’il a obtenus, il faudrait peut-être lui dire merci ?), annonçant le lancement d’une plate-forme publique de recherche avec promesse par l’État d’y injecter 20 millions d’euros (une promesse de plus), montrant un des hauts-fourneaux à l’arrêt, transformé en musée (et pourquoi pas en parc d’attraction pendant qu’on y est ?). La centaine de mécontents (eh oui, il y en avait) était soigneusement tenue à distance, ce qui a laissé tout loisir au chef de l’État d’affirmer haut et fort : « Toutes mes promesses ont été tenues. » C’est pourtant vrai qu’il a de l’humour, notre président !

Le Monde libertaire hebdo n° 1756

Les amis de trente ans et plus n’en finissent pas de se tirer dans les pattes. Ainsi, dans leur livre Sarko s’est tuer, les auteurs (Davet et Lhomme, journalistes au Monde) rapportent les propos de Jean-Pierre Jouyet (premier secrétaire à l’Élysée) révélant que François Fillon lui aurait demandé de faire accélérer l’enquête en cours sur l’affaire Bygmalion. Dans un premier temps, Jouyet dément, puis le lendemain reconnaît avoir parlé de l’affaire avec Fillon, qui lui de son côté dément absolument. Vous suivez ? Vous vous en foutez ? Vous avez raison. En attendant, c’est encore une affaire qui occupe tous les médias qui s’ingénient ainsi à faire oublier d’autres choses autrement plus importantes, comme le chômage et la précarité dans ce pays. De même qu’on voudrait nous faire « digérer » la mort de Rémi Fraisse, les manifestations qui ont suivi et leurs cortèges de violences policières. Le barrage du Testet ? Ségolène nous en parlera une autre fois, si on est sages. Et pour ce qui est du social ? Manifestation samedi contre l’austérité programmée par le budget gouvernemental. Et pour rigoler un coup, le patronat nous en sort une bonne : lui aussi appelle à manifester de différentes façons au mois de décembre. Pourquoi ? Il ne supporte visiblement plus d’avoir à justifier le « bien-fondé » des licenciements. Chaque semaine, le Medef en rajoute une louche pour souligner « la souffrance des patrons français ». On croit rêver. Dire qu’on pensait être les seuls à souffrir ! Eh bien non, nos exploiteurs « souffrent ». Qu’ils sont comiques. Finalement, on ira peut-être à leurs manifestations, histoire de leur expliquer par le menu ce qu’est la souffrance au travail. Ça les éclairera peut-être.

Le Monde libertaire hors-série n° 58 sera dans les kiosques le 25/11 !

 

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Hurlements en faveur d’une libre distribution de la presse

Article publié dans Le Monde libertaire n° 1705 (9-15 mai 2013).

Avant le monde de la finance, celui de la distribution de la presse a connu une, deux, plusieurs crises dont nous nous sommes fait régulièrement l’écho dans Le Monde libertaire (1). La dernière a généré un conflit assez rude. Il faut dire que le déficit de Presstalis (2) n’en finissait plus de se creuser pour atteindre jusqu’à 240 millions d’euros, à tel point que le mot « faillite » était de plus en plus souvent prononcé. Le système mis en place en 1947 (loi Bichet) avait été conçu pour notamment encadrer et protéger la presse dite d’opinion. À la Libération, on comptait environ trente quotidiens nationaux surfant sur l’euphorie de l’après-guerre ; le panorama aujourd’hui est évidemment beaucoup moins réjouissant : moins d’une dizaine survivent avec, pour eux aussi, un déficit chronique. Précision : la fameuse loi Bichet n’a cessé d’être contournée et détournée de sa raison d’être par les « gros » éditeurs qui ont procédé à des regroupements de titres pour tendre vers une pensée – politique – unique. Le groupe Hersant s’est particulièrement distingué dans cette discipline au cours des années 1970-1980.

Aujourd’hui, les « gratuits » papier ou en ligne n’ont rien arrangé : information basique, aucune analyse, dans des titres ou sur des sites appartenant à des groupes financiers relayant les valeurs du capitalisme.

Hachette, l’opérateur historique qui jusqu’alors avait été choisi pour chapeauter la distribution de la presse (même s’il n’en possède « que » 49 %), est de plus en plus aux abonnés absents. L’héritier Lagardère ne se gêne pas pour répéter à satiété que le papier n’a plus d’avenir. Drôle de discours lorsque l’on est un des principaux protagonistes de la distribution au numéro. Mais Internet ou les gratuits ne sont pas les seuls responsables de la crise que traversent la presse écrite et son principal distributeur. Depuis des années, les subventions publiques destinées à la presse prennent des chemins assez tortueux. Vous pensiez que ces aides concernaient la presse d’opinion ? Sachez qu’en 2011, 35 millions d’aides directes (représentant 7,4 % du total versé) ont été octroyés aux… sept plus gros magazines TV (qui se gavent déjà pas mal avec la publicité). Le but de la loi Bichet était de définir le cadre de la distribution globale de la presse sur tout le territoire national et d’établir un barème fixant une péréquation entre les différents éditeurs (les gros payant pour les petits).

Ce barème tenait compte du prix du titre (dit « prix facial »). Tout journal est ainsi rétribué sur la base de son prix facial et des subventions qu’il touche. Reste un troisième élément, qui n’entre pas en ligne de compte : les ressources publicitaires. Ce qui permet à des titres comme, par exemple, les magazines TV dont nous parlions plus haut de ne payer au réseau de distribution qu’une quote-part basée sur leur prix facial (généralement de 0,50 à 1 euro), et non sur leurs recettes publicitaires. Et, cerise sur le gâteau, ces pauvres magazines TV (pensez donc, un malheureux euro l’exemplaire !) sont donc bénéficiaires d’aides directes assez conséquentes. Bref, le beurre et l’argent du beurre, avec une dépendance de plus en plus forte à la manne publicitaire.

Parallèlement à cela, le cadre déterminant qui est autorisé à diffuser la presse n’a cessé de se fissurer. En région parisienne (et dans Paris même), kiosques et libraires ne sont plus les seuls à pouvoir le faire. Nombre de supermarchés, Monoprix, etc., le font également, mais sur une base de rentabilité : magazines TV, people, etc., se taillent la part du lion. Mais essayez de trouver dans leurs présentoirs une presse plus indépendante, alternative, engagée politiquement du genre par exemple et au hasard : Le Monde libertaire, ou Politis, ou même (soyons fous) Témoignage chrétien, je vous souhaite bien du plaisir (sans doute le manque de place !). Donc exit le principe d’un titre de presse accessible à tout citoyen, sur tout le territoire national, le jour même de sa parution. Le changement opéré par Presstalis pour la rémunération des éditeurs qui lui confient leurs titres n’a fait qu’accélérer les difficultés des « petits tirages », et nous sommes bien placés pour le savoir, Le Monde libertaire hebdo vendu en kiosque ne nous rapporte pratiquement plus rien, alors que ses frais d’impression n’ont pas disparu pour autant (3).

Nous ne sommes évidemment pas les seuls à souffrir de ces difficultés et la Filpac-CGT (4) demande une remise à plat du système de distribution pour que le financement du réseau de distribution soit assuré par :

– une contribution des éditeurs basée sur un prélèvement proportionnel à la charge publicitaire des titres empruntant le réseau ;

– des subventions publiques regroupées en une seule aide globale ;

– une contribution des fournisseurs d’accès à Internet et à toute autre société numérique exploitant la valeur des informations créées par les rédactions des titres et des agences de presse, quel que soit le support.

Nous sommes encore loin de tout ça. Et la politique de Presstalis a surtout consisté jusqu’à présent à utiliser les aides publiques pour financer ses plans de restructuration. En clair, à supprimer des postes de travail et donc les salaires correspondants. Tous les fonds publics n’ont servi qu’à financer les coûts sociaux des licenciements (contraints ou non) et les départs en retraite anticipée, etc., mais pas grand-chose n’a été fait en matière de créations ou d’innovations éditoriales. Presstalis s’étant surtout consacrée à vendre ses bureaux et dépôts de Paris intra-muros, pour en racheter d’autres plus loin en banlieue, puis pour revendre ces derniers et se rapprocher de nouveau (comme ce bâtiment flambant neuf porte des Lilas). Ce petit jeu de Monopoly n’ayant en rien freiné la dégringolade du premier distributeur national (75 % des titres environ).

Au fil des ans et des plans de restructuration, la sous-traitance aidant, le nombre de salariés est tombé à 2 500. Trop, beaucoup trop, a estimé la direction de Presstalis qui n’a pas fait dans la dentelle : le dernier plan prévoit la suppression de 1 250 postes (la moitié donc). C’est ce qui nous a valu depuis septembre 2012 une trentaine de journées de grève chez Presstalis. Finalement, après sept mois de conflit, un accord vient d’être signé entre le SGLCE-CGT (5) et la direction de Presstalis. Accord mi-chèvre mi-chou : la direction voulait 1 250 suppressions de postes en 2013 ; il n’y en aura « que » 500 cette année et 600 autres en 2014. Pas de départs contraints et reclassements prévus à la SNCF et à la Poste. À surveiller donc, les promesses n’engageant jamais que ceux les croient.

Et ensuite ? Presstalis, qui perdait chaque mois environ trois millions d’euros, compte sur le plan de réorganisation signé avec éditeurs et État (plan évalué à 250 millions d’euros) pour retrouver l’équilibre économique fin 2015. Dans quelles conditions ? Un réseau exsangue, la sous-traitance devenue la norme, une presse papier quotidienne (moins 6 % en 2012) et une presse magazine (moins 5 % la même année) en recul constant, et ceci sans tenir compte de leur hausse de prix début 2013, également des titres qui quittent Presstalis et choisissent de se faire distribuer par le concurrent, les MPL (Messageries lyonnaises de presse)…

L’avenir ne s’annonce pas radieux pour tout le réseau de distribution, que ce soit les salariés commis ou cadres Presstalis, les porteurs/livreurs et jusqu’aux kiosquiers à l’agonie. Ce dernier accord ressemble évidemment plus à une trêve qu’à un traité de paix et d’autres luttes sont à venir (6).

Ramón Pino

Fédération anarchiste

1. Voir notamment les articles sur la presse dans les numéros 1650, 1662, 1672, 1693 (consultables sur le site du Monde libertaire à la rubrique média).

2. Presstalis : anciennement Nouvelles messageries de la presse parisienne (NMPP).

3. D’où l’intérêt de s’abonner.

4. Fédération des travailleurs des industries du livre, du papier et de la communication-CGT.

5. Syndicat général du livre et de la communication écrite-CGT.

6. À noter que le groupe Salvador-Seguí animera une soirée-débat sur le thème de la distribution de la presse le vendredi 24 mai à 19 h 30, au local La Rue, 10, rue Robert-Planquette, 75018 Paris.

La distribution de la presse se désagrège

Article publié dans Le Monde libertaire n° 1662 (1er-7 mars 2012).

La situation était déjà problématique depuis juillet dernier, date à laquelle Presstalis (75 % de la distribution – quotidiens et publications) n’avait plus de coopérative que le nom ! En gros, l’esprit de la loi Bichet (1947) n’était plus respecté, c’est-à-dire que les gros éditeurs ne payaient plus pour les petits (sous-entendu la presse politique d’expression libre sans publicité). Voilà que, maintenant, les MLP (Messageries lyonnaises de presse) se mettent à lui piquer des titres, petit à petit. Les MLP, c’est la grenouille de la fable, qui se veut plus grosse que le bœuf ! Mais, finalement, elle y arrive progressivement. Les éditeurs sont des pleutres ! Après avoir voté la restructuration de juillet dernier, comme les rats, ils quittent le navire qui coule. Ça branle, donc, dans le manche ! Des titres puis, finalement, certains groupes entiers filent à l’anglaise, affaiblissant peu à peu Presstalis. Déjà Le Parisien s’était barré, se diffusant dorénavant tout seul sur Paris.

Tout ça n’est évidemment qu’un problème de coût. Les MLP payent leurs salariés au lance-pierre (à peine le smic). Presstalis, après maints et maints combats du Syndicat du Livre (CGT), rétribue plus correctement ses employés, avec des salaires et des avantages qui font pâlir d’envie ceux qui sont exploités par les négriers de la distribution. Mais les requins du capitalisme sauvage sont en train de faire la peau à tous les avantages sociaux du monde du travail. Donc le but, c’est d’estourbir Presstalis et de tout faire passer aux MLP, dont les coûts sociaux sont moindres ! Un joli tour de passe-passe sous prétexte d’une pseudo concurrence ! La distribution de la presse étant maintenant assimilée à la répartition de paquets de nouilles ! Les deux messageries en appellent au Conseil supérieur des messageries de presse pour trancher la question, mais ledit Conseil, composé de bureaucrates séniles, perché sur son nuage olympien, fait la sourde oreille et les renvoie dos à dos vers l’ARDP (Autorité de régulation de la distribution de la presse) récemment créée, qui répond fort jésuitiquement que la concurrence doit jouer. Chacun se renvoie la balle. Il faut dire que la situation est très mauvaise : les ventes baissent systématiquement, la pub fout le camp, Internet et les gratuits taillent des croupières dans ce gâteau, autrefois énorme et bien juteux ! Lorsque l’avoine manque dans la mangeoire, les chevaux se balancent des coups de sabots !

En attendant, la distribution est sous-traitée de manière honteuse. La répartition est sous-payée. Les tournées des porteurs sont rallongées et surchargées. Eux sont rétribués à coup de lance-pierre (ce sont souvent des travailleurs émigrés sans papiers). Ils ne sont pas syndiqués, et à la moindre protestation on les dégage séance tenante. En bout de chaîne, les kiosquiers n’en peuvent plus, ils voient leurs ventes s’effondrer et leurs conditions de travail se dégrader considérablement. Dans leurs « boîtes à nouvelles », crevant de chaud ou de froid, toujours sans eau ni toilettes, ils ne comprennent plus rien à cette désagrégation constante. Ils doivent traiter avec au moins trois messageries. Combien demain ? Médiakiosk, l’entreprise qui gère les édicules, vient d’être rachetée par Decaux en mal d’espace publicitaire : Presstalis le leur a vendu pour se constituer des fonds. Il est vrai qu’elle mène grand train dans son siège porte des Lilas, alors qu’elle ne gère plus qu’un dépôt à Bobigny… Il y a plus de cadres que d’ouvriers ! Seule la pub compte ! Les marchands de journaux sont traités comme du mobilier urbain. Combien de temps cela va-t-il durer ? Une grande casse se prépare. Quant à la « presse libre », dont Le Monde libertaire fait partie, elle ne devra sa survie qu’à la constitution d’un réseau parallèle efficace, pour que soient diffusées nos idées libertaires.

Patricio Salcedo

Fédération anarchiste

Regards sur la presse écrite en France

Article publié dans Le Monde libertaire n° 1634 (5-11 mai 2011).

À l’heure où la presse écrite se pose de nombreuses questions quant à son avenir, un état des lieux aiderait à comprendre la direction prise par ce secteur. Sans remonter jusqu’à la naissance de la presse en France, il semble quand même nécessaire d’examiner son évolution depuis la Seconde Guerre mondiale, et les nouvelles règles édictées à la Libération qui ont conditionné son fonctionnement – notamment sa distribution sur tout le territoire national.

Grosso modo, avant-guerre, la presse dite d’opinion était aux mains de patrons qui mettaient leurs tribunes au service de partis ou courants politiques. Les plus puissants étant évidemment progouvernementaux, et financés principalement par la publicité (ou les réclames, comme on disait alors). Certains journaux échappaient à cette contrainte de financement par la publicité soit parce qu’ils étaient l’émanation directe de partis politiques, principalement d’opposition socialiste (au sens large de ce terme), soit, et c’était plus rare, parce qu’ils avaient un lectorat suffisamment important leur permettant d’équilibrer leur budget (exemple : Le Canard enchaîné).

La Seconde Guerre mondiale va bouleverser le paysage de la presse en France. À partir de la défaite française et de l’occupation allemande en 1940, nous assistons à trois attitudes :

– Le sabordage de certains titres qui décident de ne plus paraître ou alors clandestinement (c’est le cas entre autres du Canard enchaîné, de L’Humanité, de périodiques de tendance révolutionnaire ou syndicaliste).

– La parution uniquement en zone libre (juin 1940) de titres comme Le Figaro, Paris-Soir, etc.

– La parution en zone occupée, c’est la presse collaborationniste comme Le Matin, Je Suis Partout, etc.

Dans la foulée du débarquement des troupes alliées en Normandie et en Provence et de la libération progressive du pays, et notamment de Paris, la presse va évidemment connaître un nouveau bouleversement. À partir du 18 août 1944, la presse collaborationniste devient muette. Dès le 21 août 1944, nous assistons à la parution (ou reparution) de Combat, L’Humanité, Libération (première version, de D’Astier de la Vigerie), Franc-Tireur, Sud-Ouest, Ouest-France, Voix du Nord, Parisien « libéré », Dauphiné « libéré », Maine « libre », etc., puis plus tard France-Soir (novembre 1944) et aussi, pour répondre au souhait de de Gaulle, Le Monde (décembre 1944), qui verra la naissance de la première société de rédacteurs actionnaires d’un quotidien.

Depuis des mois, les organismes de la Résistance et du gouvernement provisoire de la République française préparaient cette refondation de la presse. La liste des journaux autorisés à paraître est fixée ; les installations et imprimeries de la presse d’occupation sont reprises et attribuées aux nouveaux organes d’information, le papier est contingenté : les premiers temps, chaque journal doit se contenter d’une feuille recto-verso. La distribution va également être réexaminée : le comportement collaborationniste des dirigeants de Hachette va adjoindre cette entreprise à celles déjà frappées « d’indignité nationale ». Son monopole d’avant-guerre est terminé mais au nom de l’efficacité, son système de distribution lui permettra de faire partie de la nouvelle organisation – les Nouvelles messageries de la presse parisienne (NMPP) – avec une participation minoritaire cette fois (49 % quand même !)

En plus des informations nationales et internationales et des articles traitant de problèmes pratiques, comme le ravitaillement, les éditoriaux donnent dans le lyrisme : c’est une période d’espoir pour une « presse neuve dans une France libre » (Le Parisien libéré). Le 24 août 1944, un certain Albert Camus rédige à la une de Combat un article passé à la postérité : « Paris fait feu de toutes ses balles dans la nuit d’août. Dans cet immense décor de pierres et d’eaux, tout autour de ce fleuve aux lourds flots d’histoire, les barricades de la liberté une fois de plus se sont dressées. Une fois de plus, la justice doit s’acheter avec le sang des hommes… »

Dans ce secteur aussi il sera appliqué une politique d’épuration à l’ancienne « presse de trahison » ou « presse indigne » : leurs biens seront confisqués et donnés aux nouveaux journaux. Les responsables et journalistes de la collaboration sont jugés et condamnés, parfois à mort.

Dans l’euphorie de la Libération, certains journalistes jettent les bases d’une nouvelle conception de la presse : « Que voulons-nous ? Une presse claire et virile, au langage respectable » (Albert Camus encore). Comme on peut le voir, il fixait la barre très haut. Évidemment, passé le temps de l’enthousiasme, le niveau général de la presse allait inéluctablement baisser, et un titre aussi exigeant que Combat va voir progressivement ses ventes diminuer.

C’est en octobre 1945 que la Fédération nationale de la presse française publie la Charte de la presse reprenant les idées généreuses de certains journalistes qui souhaitent soustraire l’information au contrôle des coteries politiques et des financiers. Les grandes lignes sont : le devoir d’informer, le respect du lecteur, l’intérêt public, le droit de savoir, le respect de la vie privée, la protection des sources, l’indépendance à l’égard des pouvoirs politiques et économiques, etc.

Mais la pression économique va assez vite étouffer ces velléités d’indépendance ; dès le début des années 1950, la publicité est de retour dans la presse, confortant la situation économique de celle-ci, mais normalisant aussi son profil définitivement commercial, et la remettant sous la domination des partis et/ou de la finance. C’est cette situation que l’on retrouve aujourd’hui, mais avec des variantes : on assiste à une dispersion de la publicité (et donc de ses budgets) dans d’autres médias (radio, TV, Web, journaux gratuits, etc.)

De fait, en 2008, on pouvait constater pour la presse écrite une baisse des revenus de la publicité de 4 % ; les « gratuits » eux-mêmes accusaient une baisse de près de 7 %. Force étant de constater que les médias « papier » n’ont ni la réactivité de la radio ou de la télévision, ni l’interactivité du Web.

Si l’on détaille le coût d’un quotidien, on obtient ces chiffres : rédaction : 15 à 25 % ; fabrication et impression : 15 à 25 % ; matières premières : 10 % ; distribution : 15 à 25 % ; frais de régie et promotion : 10 % ; frais généraux : 10 à 20 %.

Mais revenons à l’immédiat après-guerre : l’ancienne loi qui régissait la presse va être remplacée le 2 avril 1947 par la loi dite Bichet (du nom du député MRP qui l’a proposée : Robert Bichet). Ses caractéristiques sont les suivantes : liberté de choix de l’éditeur ; égalité des éditeurs quant à la distribution ; solidarité entre éditeurs et coopérateurs ; liberté d’accès au réseau pour tout éditeur.

La gestion de la distribution de la presse va être confiée à un nouvel organisme : les NMPP, devenues aujourd’hui Presstalis, constitué par cinq coopératives (51 %) et Hachette (49 %). En voici ses principes : admission obligatoire de tout éditeur dans la coopérative de son choix ; garantie de l’égalité de traitement pour la distribution (aucun titre ne devant être favorisé par rapport à un autre) ; application d’une péréquation des coûts et des tarifs (les « gros » payent pour les « petits »).

Tout cela sous le contrôle du Conseil supérieur des messageries de presse constitué de : six représentants des ministères suivants : Économie, Finances, Affaires étrangères, Transports, Postes et Communications, Culture ; trois représentants des coopératives de messageries (Coope-Presse, MLP, Presse périodique) ; neuf représentants des organisations professionnelles de presse (presse parisienne, presse quotidienne régionale, presse magazine et d’opinion, presse spécialisée) ; deux représentants des dépositaires de journaux et publications ; un représentant des entreprises de distribution ; trois représentants du personnel de ces messageries ; le président de la SNCF ; le président d’Air France ; le président de la Fédération nationale des transporteurs routiers.

À cette liste de membres décisionnaires s’ajoutent les membres siégeant à titre uniquement consultatif, entre autres les représentants des organisations syndicales des kiosquiers et libraires ou maisons de la presse.

Au fil des ans, la loi Bichet va peu à peu être détournée pour imposer au diffuseur (kiosquier ou libraire) tout type de presse, alors que l’esprit de cette loi concernait surtout la presse d’opinion.

Pour finaliser la distribution (notamment dans les villes de plus de 500 000 habitants), on a confié la gestion des kiosques (implantation et entretien) à Mediakiosk (ex-AAP) qui est une filiale de Presstalis, et est financée par les affiches publicitaires qui sont apposées sur ces kiosques et par une redevance versée par les kiosquiers (redevance dont une partie est reversée à la ville pour occupation du sol). C’est évidemment encore une fois les recettes publicitaires qui composent la source de revenus la plus importante pour Mediakiosk. En 2010, pour environ 800 kiosques on note une augmentation du chiffre d’affaires publicitaire de 20 %.

Rappelons que Presstalis n’est pas une entreprise publique mais une SARL privée sous contrôle des éditeurs se composant, nous l’avons dit, de cinq coopératives (51 %) et de Hachette (49 %) avec : un conseil de gérance composé de cinq gérants des coopératives + trois gérants de Hachette ; une direction générale qui applique les décisions du conseil de gérance, propose le budget, assure la gestion de l’entreprise.

Presstalis (ex-NMPP) n’a plus tout à fait le monopole de la distribution qui se répartit ainsi désormais : Presstalis + Transport Presse (sous-traitance confiée à Presstalis), soit 85 % ; MLP (Messageries lyonnaises de presse), soit 15 %.

Cette structure représente 679 éditeurs réunis en coopératives : niveau 1 : Presstalis ; niveau 2 : 180 dépositaires ; niveau 3 : 30 000 diffuseurs (environ) répartis dans 620 kiosques (dont 330 à Paris, 770 Relay H, 3 245 points de vente dans les grandes et moyennes surfaces (GMS), 15 150 tabac-presse, 1 100 Mag-presse, 700 maisons de la presse, plus autres points : stations-services, petits commerces divers, etc.

Ce système permet d’assurer chaque jour, à peu près à la même heure, la distribution de 26 quotidiens (+ 80 quotidiens étrangers), 2 200 magazines (+ 950 étrangers), 4 000 références de produits hors presse. Le volume d’affaires annuel est de 2,56 milliards d’euros (pour un pourcentage global d’invendus de 42 %).

Tout ce bel édifice a été chamboulé depuis 2010 par une énième restructuration qui a débouché à la fin de l’année dernière sur une grève particulièrement dure. Presstalis étant déficitaire de 24 millions d’euros, que ni l’État ni Hachette (Lagardère) ne voulaient verser, un accord était finalement signé entre les ouvriers du Livre-CGT et Presstalis. Accord fragile et ne concernant pas les cadres qui seront « restructurés » plus tard. Et surtout Presstalis a changé les règles ; les livraisons étaient déjà sous-traitées, c’est maintenant la distribution des publications qui l’est par le biais de Géodis (filiale de la SNCF), Presstalis ne conservant que la distribution des quotidiens. Cette restructuration s’annonce comme une véritable entreprise de démolition d’un système qui fonctionnait tant bien que mal. En ce sens, la refonte en région parisienne des trois dépôts actuels en un seul tient plus d’une casse systématique que d’une réorganisation. Les conditions de travail des salariés de Presstalis, pour ceux qui ne sont pas poussés vers la sortie, se dégradent d’année en année ; même chose pour les diffuseurs (kiosquiers et libraires) pour qui on peut carrément parler de problèmes de survie, les différentes grèves menées ces dernières années par leurs syndicats –?entre autres le SNDP (Syndicat national des diffuseurs de presse, CGT) – peuvent en témoigner. Plus grave à notre sens : la refonte des tarifs facturés aux éditeurs qui met fin au système de péréquation des coûts de distribution prévu par la loi Bichet. Les « gros » éditeurs ne paieront plus désormais pour les « petits ».

Il est clair que l’existence même de la presse d’information politique est gravement menacée. Pas celle des news ou journaux appartenant aux grands groupes (Le Point, L’Express, Le Figaro, etc.), mais par contre les nouvelles mesures visent toute cette presse d’opinion, indépendante, alternative, non financée par les habituels marchands d’armes qui sévissent dans ce milieu. Autrement dit, les deux prochaines années vont voir disparaître des kiosques, voire disparaître tout court, un tas de titres à faible tirage qui seront noyés sous les problèmes financiers. À part la presse militante, les exemples de périodiques comme Le Canard enchaîné ou Charlie-Hebdo ne faisant pas appel à la publicité sont plutôt rares. Ce qui auparavant méritait le qualificatif de « presse libre » consistait en titres financés par la vente au numéro ou par les militants ; les associations ludiques ou politiques éditaient des revues et étaient soutenues par les lecteurs ou les galas de soutien. La presse libertaire en est un bon exemple : l’individualiste Zo d’Axa finança ses journaux (La Feuille ou L’En-Dehors – première version) grâce à des petits héritages ; Sébastien Faure édita son Encyclopédie anarchiste grâce à des souscriptions complétées par la solidarité active d’Ascaso et de Durruti rencontrés au cours d’un de leurs « séjours » parisiens, et qui détenaient un reliquat d’argent de leurs précédents braquages de banques (ce qu’on appelle aussi « reprise individuelle »). Quant à notre Libertaire devenu ensuite Le Monde libertaire, il n’a pu être édité qu’à partir de souscriptions et de galas de soutien annuels, grâce au concours d’artistes partageant notre idéal, comme Georges Brassens, Léo Ferré, Léo Campion, Jacques Debronckart, Bernard Lavilliers, François Béranger, Serge Utgé-Royo et bien d’autres. En revanche, nous n’avions pas, comme d’autres, le soutien de certaines ambassades de pays dirigés par des « partis frères ». La presse du PCF a largement profité de l’aide du grand frère « soviétique », ne serait-ce qu’avec les abonnements « recommandés » de certains de ses titres auprès des bibliothèques de nombreuses communes d’URSS. Idem pour certaines publications d’organisations maoïstes françaises reconnues et soutenues par Pékin. Ces appuis ayant aujourd’hui disparu, on peut constater la situation catastrophique de ces publications, L’Humanité en étant même à devoir accepter la participation financière d’un Lagardère (l’argent n’a vraiment pas d’odeur !). Et que dire d’une presse dite indépendante, style Libération (avec la banque Rothschild comme actionnaire) ou Les Inrockuptibles (banque Lazare) ? Quant à la presse de droite, rien de nouveau, les grands groupes financiers, et notamment les marchands d’armes, tiennent toujours les cordons de la bourse, ce qui leur permet de soutenir la politique de leurs représentants au Parlement (comme à chaque campagne électorale, nous pourrons le vérifier en 2012). Les temps qui viennent s’annoncent difficiles pour la presse anarchiste, et donc pour Le Monde libertaire. Cette réforme des tarifs de Presstalis est une véritable attaque contre la diffusion des idées et donc contre la liberté d’expression. La boucle est bouclée, l’esprit enthousiaste qui avait émergé à la Libération, appartient définitivement au passé.

À nous de lutter contre l’asphyxie économique programmée par le réseau de distribution, entre autres en développant les ventes militantes et les abonnements à notre Monde libertaire. Une dénonciation de cette atteinte à la liberté de la presse et une riposte coordonnée de la presse indépendante et alternative seraient le minimum à réaliser face à la violence du système qui nous remet en mémoire cette déclaration d’Albert Camus (toujours lui) : « J’ai compris alors que je détestais moins la violence que les institutions de la violence. »

Patricio Salcedo & Ramón Pino

Fédération anarchiste

Presstalis : une réforme scélérate

Une fois de plus, Le Monde libertaire est menacé de mort !

Engagé depuis plusieurs années, un vaste plan de réforme vise à moderniser et rentabiliser Presstalis, principale entreprise de distribution de la presse en France, qui contrôle actuellement 80 % du marché.

Jusqu’à présent, force est de constater que cette initiative a surtout abouti à une baisse drastique des effectifs et à des coûts de restructuration qui, ajoutés à un recul du volume d’affaires (ventes réalisées), ont mis Presstalis au bord du dépôt de bilan. En 2009, ses pertes nettes atteignaient 26,5 millions d’euros.

La situation d’urgence, propice aux « décisions douloureuses », explique sans doute le fait que la recapitalisation de Presstalis par les éditeurs et le groupe Lagardère, ainsi que l’aide de l’État, ont été conditionnées à une restructuration en profondeur de l’entreprise. Celle-ci comprend, entre autres, une refonte des barèmes (les tarifs facturés aux éditeurs), qui refléteront désormais le « coût réel » de la prestation de la messagerie de presse, et qui entreront en application au 1er octobre 2010. Ainsi, Presstalis rompt avec l’un des derniers axes subsistant de la loi Bichet (qui encadre, depuis 1947, la distribution de la presse), fondé sur une certaine péréquation des coûts de la distribution, en particulier pour les titres d’information politique et générale.

Seront désormais facturés à tous les éditeurs, ce qu’on appelle les « appoints » : ce terme technique désigne l’opération manuelle consistant à extraire des liasses standards le nombre d’exemplaires complétant les quantités demandées par les dépositaires (lesquels les ventileront, ensuite, vers les marchands de journaux). Par exemple, pour 67 exemplaires commandés par tel dépositaire, l’opérateur expédiera une liasse de 50 exemplaires fournie par l’éditeur, et « cassera » une autre liasse pour y prélever les 17 exemplaires manquants.

Il est évident que pour les « gros » titres, cette mesure ne représente rien. Lorsqu’on livre des milliers d’exemplaires à chaque dépositaire du réseau, une liasse complète de plus ou de moins n’a pratiquement pas d’importance. Ainsi, nombre d’éditeurs de la presse bourgeoise pourront échapper à un dispositif qui s’avérera particulièrement coûteux pour les autres.

Ceux-là, dont la diffusion ne dépasse guère le millier d’exemplaires, sont systématiquement soumis à « l’appoint », car les quantités réclamées par les dépositaires sont, en comparaison, infinitésimales. Et, pour reprendre l’exemple donné plus haut, ils ne pourront livrer deux liasses de 50 exemplaires au dépositaire qui a commandé 67 exemplaires, à moins de prendre le risque d’augmenter dangereusement les invendus (dont l’importance joue également sur la facturation de Presstalis)…

Conséquence directe pour Le Monde libertaire : un coût de distribution de l’ordre de 120 % !

Ironie du sort, notre titre appartenant à la famille d’information politique et générale, bénéficie tout de même d’une mesure de protection : nous ne pouvons être débiteurs, aussi le coût en est ramené à 100 %. Merci Presstalis…

Pour ne parler que des titres libertaires, tous sont concernés, et tous seront touchés dans une mesure comparable. Aussi, la refonte des barèmes adoptée par Presstalis conduira rapidement à l’asphyxie économique d’une partie de la presse d’opinion opposée à la logique marchande et à la raison d’État.

Il est dit qu’au titre de la « garantie du pluralisme » sur l’ensemble du territoire, l’État abondera une aide à hauteur de 18 millions d’euros. En admettant qu’il soit concerné, Le Monde libertaire n’entend pas se mettre sous perfusion d’État, alors que si peu d’efforts sont déployés pour rendre notre titre visible – et par là même accessible – dans les kiosques.

Depuis 1954, l’hebdomadaire de la Fédération anarchiste, sans maître et sans publicité, doit son existence, d’abord, à l’effort de ses militants et à la fidélité de ses lecteurs. Cela étant, nous n’acceptons pas l’abandon du principe de péréquation qui a toujours prévalu, notamment pour les titres d’information politique, et qui s’approchait un peu d’un des grands principes défendus par les libertaires : de chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins.

Nous appelons donc l’ensemble des libertaires à nous rejoindre dans la lutte pour la défense de nos moyens et de notre liberté d’expression.

Administration du Monde libertaire

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Le Monde libertaire ouvre son blog Mediapart

Fondé en 1954, héritier direct du Libertaire créé en 1895 par Sébastien Faure, Le Monde libertaire est le journal de l’organisation révolutionnaire Fédération anarchiste. Parmi les plus vieux titres de la presse française, il se décline aujourd’hui en trois formules :

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Pour s’abonner, c’est très simple, il suffit de se rendre ici : http://www.monde-libertaire.fr/le-monde-libertaire/12702-sabonner

Bonne lecture et à bientôt dans les luttes !

L’administration du Monde libertaire

Août 2014

Le Monde libertaire hebdo quitte les kiosques

Lors de son 72e congrès, réuni à Saint-Imier les 7, 8 et 9 juin 2014, la Fédération anarchiste a décidé de sortir des kiosques Le Monde libertaire hebdomadaire. Cette décision difficile a été prise en raison des coûts exorbitants qu’exigeait cette présence, des coûts que notre journal ne peut financièrement plus supporter. Nous cherchons toutefois actuellement à savoir si l’hebdomadaire pourrait rester présent dans les Relay H des gares SNCF ; le cas échéant, nous vous tiendrons informés. Sachez, néanmoins, que les numéros hors série (six par an) seront toujours bien présents dans les kiosques, cette mesure ne concernant que la formule hebdomadaire. Désormais, donc, pour pouvoir lire chaque semaine Le Monde libertaire, il faudra se tourner vers une des trois formules d’abonnement, qui ont toujours été la meilleure façon de nous soutenir !

L’administration du Monde libertaire

Août 2014

Le Monde libertaire hebdo n° 1754

Après l’UMP et le FN, voilà que le PS engage aussi en son sein un débat d’importance : si on changeait de nom ? Ainsi, « Parti socialiste » sonnerait un peu ringard… Supprimer la référence au socialisme serait faire preuve de cohérence, tant le PS n’a plus rien à voir avec le projet de société défendu jadis par les socialistes. Désormais rangé du côté du libéralisme, il ne se différencie plus de la droite que par un certain progressisme quant à certaines questions sociétales. Pas sûr, toutefois, que ce souci de cohérence idéologique soit le moteur des scènes de ménage suscitées au sein du PS par cette question. Il faudrait davantage y voir de l’opportunisme politique, une façon de faire face dans la tempête d’une opinion dégoûtée du vieux parti. Changer de nom pour nous faire croire que, désormais, les positions ont changé et que l’avenir n’en sera que plus radieux. Une stratégie assez pathétique pour regagner un électorat qui ne se fait plus beaucoup d’illusions sur les capacités du PS à résoudre le problème social. Sur ce fond de crise d’identité, la famille socialiste se déchire. Aubry se réveille un beau matin en se découvrant frondeuse, exigeant du gouvernement qu’il change de cap en matière de politique économique. Filippetti et Hamon, qui ne digèrent toujours pas d’avoir été mis à la porte de leur ministère, font preuve d’un courage digne d’un résistant en 1940 en s’abstenant de voter le budget. La vieille garde au pouvoir s’indigne, demande les exclusions, condamne ces attitudes jugées scandaleuses et trahissant un profond manquement au devoir politique (lol). Dans tout ce fourbi, une chose reste pour nous néanmoins sûre : les partis auront beau changer de nom et d’éléphants, ils resteront les mêmes, à l’antipode de nos intérêts, ceux des travailleurs.